Lettre à Margaux

• Rédigé par Marc Bonnant - -

« On vous dit absente pour un temps. L’âme bienveillante qui préside à notre amitié m’assure que vous allez mieux, mais que vous prolongerez votre congé si nécessaire. Elle a toutefois refusé de me dire où l’on vous cache. La discrétion : c’est à cela qu’on reconnaît les êtres de valeur. Jamais elle ne vous trahira. Elle vous est féale comme une gouvernante anglaise, préférant consumer sa vie pour préserver la vôtre. Croyez-moi, l’en remercier lui ferait injure. Pourtant je sais que vous y céderez, et ce jour-là elle vous quittera, non sans tristesse mais avec le sentiment du devoir accompli. Vous et moi sommes de cette engeance policée qui estime, bien à tort, que la gratitude n’est qu’une affaire de mots ; elle, en revanche, fille de pâtre née en pays de chaumes, a grandi là où le secret et la servitude sont érigés en vertus.

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Lettre à Gautier Comte

• Rédigé par Marc Bonnant - -

« Ce matin, l’aube est prise dans un givre précoce. Depuis la terrasse, je l’observe se répandre sur les jardins en humant à pleines narines les effluves de pourriture qui s'en exhalent. Mon grand aulne au port si courbe… je t’achèverai dès l’hiver venu, avant que tu ne t’effondres dans la rivière. Tu as fait ton temps. Il faut savoir donner une fin aux choses les plus opiniâtres, même quand elles nous sont chères ; c’est mieux pour elles, c’est mieux pour nous.

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Lettre à Josué [1]

• Rédigé par Marc Bonnant - -

« Que n’ai-je vu en cette vie, dans la posture silencieuse de celui qui se tapit pour mieux voir, — à quoi n’ai-je assisté dont le sens m’ait rappelé à la vanité de mes actes puisque, de toute évidence, les autres s’ingénient à mieux faire… Que n’ai-je aperçu au détour d’une sente ou derrière un taillis qui m’ait réconcilié avec les mœurs présumées insipides de nos concitadins, d’ordinaire si soucieux de soigner leurs apparences… Mais de vous à moi : est-ce ma faute si, à chaque fois que la bête s’ébroue, le hasard me place au meilleur endroit pour la surprendre ? Est-ce mon destin si je dois être témoin malgré moi de ces choses inexprimables que la raison nous dicterait d’ignorer ?

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Dernière lettre à Aurélia

• Rédigé par Marc Bonnant - -

« Si, à chaque fois que s’exerce la magie du chagrin, vous me gratifiez des sentiments les plus universels et qu’ensuite, prenant conscience du trouble que vous avez semé, vous ressentiez le besoin de les justifier par la honte, vous comprenez qu’aussitôt que je m’adresserai à vous, je me demanderai à quelle Aurélia je parle, à laquelle des figures de l’amie plurielle mes mots seront destinés. Car en toute bienveillance, je pourrais faire varier mon discours autant de fois que nécessaire pour ne pas heurter en vous tantôt l’amie, tantôt la confidente, tantôt la muse, tantôt l’âme sœur, sans ne jamais montrer mon vrai visage, sans ne jamais exprimer mes émotions (à supposer que j’en éprouve), et ce dans le seul but de sauvegarder, pour peu qu’elle puisse l’être, la relation singulière que nous entretenons à défaut de nous connaître vraiment.

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